Panneaux solaires, nids à porcelets, alimentation de précision… la maternité porcine du futur de Guernévez, à Saint-Goazec (Finistère), inaugurée vendredi, se veut un modèle en matière de consommation énergétique, de conditions de travail et de bien-être animal, avec l’objectif de relancer la filière.
Une truie de plus de 200 kg couchée sur le flanc et une dizaine de porcelets goulument pendus à ses mamelles, avant de s’endormir bienheureux sur une dalle chauffante: dans la « maternité » de la station expérimentale porcine de la Chambre régionale d’agriculture de Bretagne, l’ambiance est particulièrement paisible.
« On a cherché à améliorer au maximum le confort de la truie et des porcelets », explique à l’AFP Brigitte Landrain, responsable du pôle porcs, à propos de cette « maternité » qui accueille les porcelets pendant 28 jours, avant qu’ils ne partent à l’engraissement, puis à l’abattoir à l’âge de six mois. « Des animaux en bonne santé et calmes ce sont des animaux performants », assure-t-elle.
A première vue, difficile de percevoir les innovations dont le bâtiment de 250 m2 regorge et qui vont de la présence de larges ouvertures et de puits de lumière afin de réduire l’éclairage artificiel –régulé par des capteurs de luminosité–, à un système de pilotage du bâtiment via tablette ou téléphone multifonction.
La structure recèle cependant des « nids » à porcelets garantissant une température de 35°C, alors que la truie lactante n’a besoin que de 18 à 20°C. Ces nids assurent le bien-être animal, mais aussi une diminution de la consommation énergétique. Autre innovation: les truies sont nourries automatiquement selon leur consommation, afin d’éviter les gaspillages et les excès de nourriture.
Isolation des murs, panneaux solaires thermiques pour chauffer l’eau circulant sous les dalles chauffantes, pompes à chaleur et échangeurs de chaleur, sorte de VMC (ventilation motorisée continue) à double flux puisant les calories de l’air extrait du bâtiment pour les transférer à l’air neuf entrant, complètent le tableau.
– Performance énergétique –
« Nous avons pour ambition de faire en sorte que les porcheries du futur soient un peu conçues sur le même modèle que les habitations BBC, à basse consommation d’énergie », s’enthousiasme Paul Auffray, président du pôle porcs de la Chambre d’agriculture de Bretagne.
« Ce qu’on souhaite c’est que l’impact environnemental des porcheries soit nul et même que demain leur bilan énergétique soit positif », ajoute-t-il, alors que la production porcine est souvent contestée pour son impact environnemental et sa consommation énergétique relativement élevée, et dont le coût ne cesse de croître.
Une truie coûte aujourd’hui 75 euros par an en coûts énergétiques, un montant appelé à passer à 130 euros en 2025, selon l’Institut français du porc (Ifip).
« La filière a besoin d’être plus compétitive et ça ne passera que par des outils collectifs comme celui-ci », estime Philippe Bizien, président du Comité régional porcin de Bretagne, regrettant un manque de modernisation dans les élevages.
Plus de 60% des « maternités » porcines ont plus de 20 ans, selon la profession, qui estime à près de 3 milliards d’euros les besoins pour moderniser et mettre aux normes les bâtiments porcins, dont 500 millions pour les maternités.
« Je trouve très intéressant tout ce qui est lié au chauffage d’eau en utilisant des panneaux solaires thermiques pour le bien-être des cochons », assure Sophie Jézéquel, productrice de porcs non loin du site expérimental, venue à l’inauguration de la nouvelle maternité.
« Nos trésoreries sont cependant extrêmement tendues », regrette-t-elle, alors que la filière est en crise depuis plusieurs années, avec une baisse de la production –le cheptel est passé de 25 millions en 2010 à 23 millions de têtes en 2013– dans un contexte de forte concurrence allemande.
« Aujourd’hui, le coût d’un projet expérimental comme celui-ci est forcément prohibitif, mais il y a fort à parier que lorsque ces techniques auront été validées, il diminuera », assure Paul Auffray. La maternité de Guernévez, unique en France, a coûté 240.000 euros, soit deux fois plus qu’une structure traditionnelle.